L’hyperphagie, les kilos et moi – Partie 1

« Toi tu aimes manger, ça se voit ! »
« Tu es trop gourmande ! »
« Tu ne fais aucun effort pour te retenir. »

Ces phrases, elles ne sont pas complètement fausses, mais pas tout à fait vraies non plus. Oui, j’aime manger, et oui je suis gourmande. Surtout de tout ce qui est sucré. Mais je fais des efforts pour me retenir, même si je n’y arrive pas toujours … Aujourd’hui, j’aimerais te parler de l’hyperphagie, un trouble alimentaire, au même titre que l’anorexie ou la boulimie, mais un peu moins connu.

La prise de conscience

Revenons quelques années en arrière si tu le veux bien. Tout commence par une visite chez un médecin « non conventionnel ». Pour te dire vrai, je ne sais même plus trop pourquoi j’y suis allée, probablement pour mes problèmes de migraine. A peine a-t-il fermé la porte de son cabinet qu’il me dit « tu as un problème avec la nourriture ». Il est vrai qu’en à peine un an, j’ai pris plus d’une dizaine de kilos (je ne me pesais plus, je l’ai su sur la balance du médecin …). Suite à ses questions, je réussi à lui dire que je mange souvent des aliments sucrés, ou gras, mais sans lui avouer l’étendue de mes « grignotages ». Parce qu’en réalité, je suis dans un déni complet.

Crédit photo (creative commons) : stevepb

Quelques mois plus tard, je retourne le voir pour faire un point. En trois mois, j’ai encore pris environ 5 kilos, alors qu’il me semblait avoir fait attention à mes repas. Mais mes crises (car à ce stade, on ne peut plus parler de grignotages) ne se sont en fait pas espacées. Je n’ai juste toujours pas conscience de mon problème.

Ce deuxième rendez-vous me touche beaucoup, je me sens très mal, je ne comprends pas ce qui m’arrive. J’essaie de me dire que c’est à cause de ma contraception si j’ai pris autant de poids, mais au fond de moi, je commence à entrevoir ma relation problématique avec la nourriture.

Finalement, je fais quelques recherches sur Internet, et je découvre un trouble alimentaire qui correspond à ce que je vis : l’hyperphagie.

Les crises d’hyperphagie

Dès que je sors quelque part, j’espère trouver un magasin sur ma route, pour pouvoir m’acheter quelque chose à manger. A chaque fois. Quitte à faire un léger détour.

Ce que je m’achète à manger, je le finis toujours, toute seule, et en cachette, pour que personne ne s’en aperçoive. Je ne laisse pas les traces des paquets vides, ou des papiers de tablettes de chocolat. Tout est toujours bien enfoui dans la poubelle. Personne ne connait mon secret.

Je me remplis de nourriture, jusqu’à en avoir mal au ventre, à être nauséeuse. Mais pour que personne ne me pose de questions, je mange aussi tous mes repas normaux, même après une crise, alors que je n’ai absolument pas faim. Et je culpabilise bien sûr. Après chaque crise, ce n’est plus que du dégoût envers moi-même, de la colère. Et je me dis que ce sera la dernière fois. Que je vais me retenir. Que je vais y arriver.

Crédit photo (creative commons) : Greyerbaby

Mais c’est plus fort que moi. A la moindre contrariété, dès que je suis seule, sans vraiment de raison, je DOIS manger. Je ne pense qu’à ça, ça me hante. Je ne peux plus penser à rien d’autre. Je me sens vide, je me sens seule, je me sens triste. La nourriture me console, me remplit, comble ce vide que je ressens en moi. Alors je mange, plus que de raison. J’engloutis, plutôt, car le but est de se remplir, vite, pour ne plus penser à rien. C’est une pulsion que je n’arrive pas à contrôler. Tant que je n’ai pas cédé, tant que je n’ai pas mangé, rien d’autre ne compte, rien ne parvient plus à mon cerveau. Je me rends compte que ces crises arrivent très fréquemment, à raison de deux ou trois par semaine.

Et contrairement à la boulimie, il n’y a pas de processus compensatoire dans l’hyperphagie : pas de sport, pas de vomissement … Ce qui entraîne une rapide prise de poids. Malheureusement, celle-ci est passée inaperçue aux yeux de mon entourage, car j’ai la « chance » de prendre des kilos uniformément, alors, non, ça ne saute pas aux yeux. Mais la balance, elle, ne ment pas.

Le constat est dur, et sans appel. Je suis droguée à la nourriture.

Et toi, souffres-tu de troubles alimentaires ? Tu veux nous en parler ?

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8 Comments

  • Leaureine

    4 décembre 2019

    Juste merci.
    Je me reconnais, enfin, dans cette description. Je savais que quelque chose clochait, que moi aussi j’avais un problème avec la nourriture, mais quoi ?
    Merci d’avoir mis un nom sur ce trouble.

    • Welna

      4 décembre 2019

      De rien, j’espère que ça pourra t’aider ! En tout cas, pour moi, de savoir de quoi je souffre a été le premier pas sur le chemin de la guérison.

  • Jess

    4 décembre 2019

    Bonjour, quel soulagement de voir que je ne suis pas la seule dans ce cas-là!
    Merci pour ton témoignage.
    J’aimerais savoir ce que tu entreprend pour te soigner de ce mal, car j’ai manifestement le même problème que toi.
    En ce moment, avec le stress du travail, une petite de 3 ans un peu difficile et des douleurs chroniques j’ai tout le temps besoin de manger. Avant c’était surtout du sucré, et maintenant c’est à peu prés de tout!
    Et même si je me vois dans le miroir grossir à vue d’œil, je n’arrive pas à contrôler mes pulsions.
    Je suis contente de t’avoir lue et te souhaite du courage pour le chemin de guérison.

    • Welna

      11 décembre 2019

      Bonjour Jess, non tu n’es pas la seule dans ce cas ! Alors, durant cette grosse période de crises, j’étais mal psychologiquement, et je trouvais refuge dans la nourriture. Aujourd’hui, je vais mieux, mais je reste très vigilante. Le fait d’avoir pris conscience de mon problème m’aide aussi à rester sur le « droit chemin ».

      C’est très difficile de contrôler ces pulsions. Essaie d’occuper ton cerveau à autre chose : sors prendre l’air, prends un bon livre, tricot, puzzle, … Quelque chose qui t’oblige à recentrer ton attention sur autre chose que la nourriture …
      Courage à toi, et essaie d’en parler autour de toi, tu trouveras sûrement du soutien auprès de tes proches !

  • Joy

    4 décembre 2019

    J’en souffre aussi. Et je cherche le déclic encore et encore, pour enfin me réguler en mangeant.

    • Welna

      11 décembre 2019

      Courage … Pour moi, le déclic a été de prendre conscience de ce problème (quand je parle de déni, c’est vraiment le cas : je ne m’étais même pas vu grossir malgré les 15gk supplémentaires …), et la souffrance physique pendant ma semaine de randonnée. Tu trouveras aussi ton déclic, j’en suis sûre !

  • Maug

    4 décembre 2019

    Coucou. Je vous mets ici un lien l annuaire des spécialistes des troubles alimentaires selon votre lieu d habitation.
    https://www.ffab.fr/images/mesimages/pdf/2017_ANNUAIRE_DEFINITIF.pdf

    • Welna

      11 décembre 2019

      Merci beaucoup !

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