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A la une / témoignage

Ici ou ailleurs

Mes parents m’ont transmis un (gentil) virus : le goût du . Quand j’étais petite, on me demandait si je ferais comme eux, si j’irais vivre à l’étranger, et je clamais haut et fort que NON : je choisirais une maison et je n’en bougerais plus. Et puis j’ai grandi.

Je n’ai réellement connu la France métropolitaine qu’à l’âge de 15 ans, puisque mes parents ont quitté la France pour la Guadeloupe quand j’avais 4 ans. Nous y sommes restés sept ans. Toute mon enfance a été rythmée par la Guadeloupe, son climat, ses croyances, ses traditions, ses émissions télé…

Puis, mon père a vendu son entreprise, et nous avons atterri au Costa Rica, « pour voir », sans jamais y être allés avant. Nous y sommes restés deux ans.

Vivre à l'étranger

Crédits photo (creative commons) : Arturo Sotillo

Pendant neuf mois, on a parcouru toute la côte ouest, afin de trouver l’endroit idéal pour poser les valises. Pendant ce temps, nous n’allions pas à l’école. Quand mes parents se sont décidés, nous avons intégré l’école locale, puis le collège privé. Dans ce collège, il y avait beaucoup d’étrangers comme nous. Ce de vie nous semblait donc presque normal.

Après, est venu le Nicaragua. C’est le déménagement qui m’a le plus attristée : j’ai pleuré pendant une semaine, en espérant que mes parents changeraient d’avis. J’aimais ma vie au Costa Rica. Nous étions dans des collèges religieux, car privés, mais en décalage avec nos croyances. Nous nous étions vite fait des amis.

Puis, ma sœur est tombée gravement malade : elle était aux soins intensifs. Mes parents ont subi un gros souci financier. Enfin, arrivait la question des études pour nous. La solution à tous ces soucis était de rentrer en France. Après deux ans au Nicaragua, et dix ans sans avoir connu d’hiver, nous devions tout quitter et rentrer en plein mois de janvier.

Je n’avais pas envie de rentrer. On n’avait que les informations de TV5 pour se faire une idée de la vie en France, et ça ne donnait pas envie. Mais on savait que c’était ce qu’il fallait faire.

Arrivée en France, ma sœur a très vite été prise en charge et soignée. Mes parents ont eu beaucoup de mal à trouver un . Ils ont dû se battre contre des murs administratifs pour faire comprendre qu’on arrivait de l’étranger, mais que nous étions des Français parlant parfaitement français (je le précise, car nous avons failli être scolarisées dans des classes spécialisées pour apprendre le français).

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Puis, la routine s’est installée, et nous avons appris à vivre le quotidien d’enfants français. Mais tout au fond de nous, il y avait un vide, l’impression de ne pas avoir notre place ici. De ne pas être comme les autres.

J’ai appris qu’il était possible d’être sentimentalement attaché à un meuble, ou même d’avoir vécu dans la même maison toute sa vie. Tout ça était nouveau pour moi, et si moi je comprenais mal ce mode de vie, mes camarades ne comprenaient pas non plus notre passé. Alors, j’ai cessé d’en parler. Au lycée, j’étais comme tout le monde. Seuls ceux qui me connaissaient depuis longtemps savaient.

J’ai eu mon Bac L. Après quoi, je suis retournée au Costa Rica et au Nicaragua avec mon père et ma sœur, pour revoir nos amis pour les vacances. Mais les choses n’étaient plus les mêmes. Tant de choses avaient changé pour eux, et pour nous.

J’ai eu ma licence en Langues Étrangères Appliquées, et j’ai passé une année en ERASMUS en Angleterre. Une expérience incroyable. Je me retrouvais dans la manière de penser des Anglais, j’adhérais complètement à leur manière d’enseigner. Mais j’ai parfois eu de gros coups de blues : ma famille me manquait, et je me sentais parfois seule, malgré la solide communauté ERASMUS.

J’ai essayé de faire un master de Négociation de Projets Internationaux, mais la première année a été très dure. Je retrouvais le système scolaire non participatif français, et je ne m’entendais pas avec deux de mes professeurs, qui refusaient d’expliquer.

Au lieu de faire la seconde année, je suis partie en Australie, grâce à un Visa Vacances-Travail (je me disais que je reprendrais mes études à mon retour). Neuf mois à travailler pour voyager, à faire des petits boulots pour pouvoir découvrir toujours de nouvelles choses. J’avais toujours quelque chose de prévu, un endroit à découvrir, des gens à rencontrer. Tout semblait si simple. Puis, il a fallu rentrer…

Grosse déprime, car soudainement, je n’avais plus rien à faire. J’ai rencontré mon chéri, mais j’avais déjà programmé de repartir. Je devais finir mon tour d’Australie, et faire aussi la Thaïlande, le Cambodge et le Laos en quatre mois. Pour lui, je suis rentrée plus tôt : en deux mois, j’ai fait le nord de l’Australie et la Thaïlande, pensant faire le reste avec lui plus tard.

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Encore une fois, le retour a été très dur. J’ai refusé de reprendre mes études. Mais j’ai fini par trouver un petit job, et j’y ai évolué. Je travaille beaucoup, je fais facilement quarante-deux heures par semaine.

Ma sœur s’est mariée. Avec mon chéri, on a emménagé ensemble au bout de trois ans, et on parlait souvent bébé et mariage. En quatre ans de relation, nous n’avons jamais voyagé, malgré mes demandes répétées. Ses projets professionnels passaient toujours avant. Je pleurais régulièrement, sans raison apparente.

Et un jour, l’année dernière, j’ai craqué. C’était comme si je me réveillais et que je me rendais compte que ce n’était pas ma vie que je vivais, mais celle d’un autre. Depuis, je suis un peu en stand-by. Je vis en colocation : c’est une solution de transition financièrement très pratique. Je me suis rattrapée côté voyages, mais toujours en vacances. Je vis au jour le jour, sans gros projets en vue.

Bref, j’ai la bougeotte. La petite fille en moi veut toujours acheter sa maison (ou plutôt son appart), et je suis jalouse de mes copines mariées et mamans. Mais quelque part, je sens que ce n’est pas pour moi. J’ai l’appel du large qui résonne en moi très souvent, et pourtant, je cherche aussi la stabilité et la sécurité.

À un moment, j’ai pensé que si j’avais une situation me permettant de voyager régulièrement, je pourrais avoir la stabilité et les voyages. Déjà, c’est loin d’être le cas. Et puis surtout, je me rends compte que j’ai besoin de vivre dans les pays afin de m’y sentir vraiment bien. Mais je sais que je dois prendre une décision.

J’ai peur que si je pars, tout ce que j’ai construit ici soit perdu (mes relations amicales et professionnelles, et mon projet immobilier, même s’il n’est que dans ma tête pour le moment). Mais j’ai aussi peur de passer à côté de mes envies si je reste, et que ma situation stagne…

Et toi ? Tu as passé une partie de ton enfance à l’étranger ? Penses-tu que ça t’a donné le goût du voyage, ou qu’au contraire, ça t’en a dégoûtée ? Quels sont tes projets pour l’avenir ? Raconte !

Toi aussi, tu veux témoigner ? C’est par ici !

A propos de l’auteur

J'ai 28ans. J'ai passé la moitié de ma vie à voyager avec mes parents puis seule, maintenant je vis en colocation dans le sud de la France, réceptionniste,presque végétarienne, tricoteuse, j'aime faire tout moi meme!

8 Commentaires

  • Madame Fleur
    2 mai 2016 at 8 h 04 min

    Je suis un peu ton exact opposé 🙂 J’avoue que voyager hors vacances ne me tente pas du tout et je n’ai jamais souhaité vivre à l’étranger.
    Pourtant je sens bien le dilemme qui t’habite. J’ai eu la possibilité de participer à l’étranger mais je me sentais bien incapable de quitter mon chéri et ma famille. Il est vrai que quand la personne est loin à l’etranger, les relations sont plus compliquées et on manque de nombreuses choses de la vie des autres. Mais si tu es malheureuse, je pense que c’est une expérience qu’il te faut tenter. Tu pourras toujours revenir si l’envie et le besoin d’en font ressentir.

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  • Ornella
    2 mai 2016 at 8 h 16 min

    Comme je me reconnais dans ton temoignage. J’ai passé la grande majorité de mon enfance à voyager et je m’etais juré moi aussi que plus tard, je serais enfin de quelque part. C’est bien plus dur qu’on ne le pense, la vie de sédentaire. Aujourd’hui j’essaye de faire comprendre ces envie d’ailleurs à mon conjoint mais ce n’est pas toujoirs simple. J’espere que tu vas trouver un equilibre qui te convienne.

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  • Mme Ebène
    2 mai 2016 at 9 h 03 min

    Je te confirme que voyager régulièrement est loin d’être comme s’installer quelque part. J’ai clairement la bougeotte aussi et même si je suis en mode sédentaire pour le moment, propriétaire dans une ville que j’adore, je ne me vois pas passer toute ma vie ici. C’est encore un bébé projet mais si tout se passe bien on ira bientôt se poser en Argentine pour au moins 2 ans 🙂 J’ai un peu peur de ne pas trouver de boulot… mais j’ai hâte !

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  • Aline
    2 mai 2016 at 10 h 23 min

    Je me reconnais dans le dilemne que tu as, cette profonde envie de voyager et l’envie également de stabilité. Pourtant, j’ai eu une enfance et vie très sédentaire, la même maison toute ma jeunesse et j’ai un peu voyagé mais uniquement depuis que je suis majeure et pour des vacances, on essaie de faire un voyage par an en fonction de notre budget, destination proche ou lointaine. Mon frère et ma sœur sont tous les deux expatriés à l’autre bout du monde dans deux pays différents, la famille de chéri est également à l’étranger. Et moi de mon côté, je n’arrive pas à me poser et pour le coup franchir le cap de devenir propriétaire. Je n’ai pas encore trouvé l’endroit où je peux dire « c’est ici chez moi ». J’ai tout le temps envie de bouger, je me lasse vite. En douze ans j’ai changé 12 fois d’apparts et 5 fois de villes, régions. Je rêve de partir, de m’expatrier, de découvrir de nouvelles contrées, d’autres façons de penser, mode de vie. On a également un projet qu’on aimerait bien réalisé à l’étranger, mais il faut pouvoir le financer. Je n’ose pas franchir le cap sans avoir le job qui me permette de partir en confiance, l’esprit sécurisé. Un autre rêve serait de faire le tour du monde pendant un an ou deux. Je crois qu’il faut oser, se lancer pour ne pas avoir de regrets mais plus difficile à dire qu’à faire. J’ai du mal avec la vie en France, le côté on se plaint tout le temps, jamais satisfait, au secours les actualités, à éviter. Et puis le côté métro, boulot, dodo, c’est une drôle de vie, j’aimerais profiter plus de mes journées, être plus zen, vivre au jour le jour dans un climat plus ensoleillé même si ça fait un peu cliché. Je sais bien qu’il y a des avantages et inconvénients dans chaque endroit et que le quotidien est toujours différents du vécu que l’on peut avoir lors d’un séjour vacances. Et en même temps je trouve que la France est un pays riche par la beauté de ses paysages, son histoire, sa gastronomie… Et puis les gens qui nous sont proches nous manque aussi. A part mes parents et nos amis, notre entourage est éparpillé un peu partout. Pas facile de voir les personnes qui nous sont proches qu’une fois par an. On a un bébé et par contre pour moi ce n’est pas du tout incompatible avec le fait de bouger, partir, changer de pays… ça demande juste plus d’organisation et mon mari qui a beaucoup voyagé et changé d’écoles aimerait que notre enfant puisse grandir avec les mêmes copains. Alors l’idéal serait de pouvoir bouger avant que bébé ne rentre à l’école.

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  • Sadoudoue
    2 mai 2016 at 10 h 42 min

    J’ai grandi aux Antilles, j’ai vecu aux Etats-Unis, en Asie du Sud Est. J’ai travaille en Afrique de l’Ouest et ai eu des deplacements professionnels dans pas mal de pays. Mon mari et moi preferons un gros budget voyage que d’avoir un gros bijou (j’aime quand meme les bijoux hein). Nous avons la bougeotte tous les deux. Je suis convaincue que c’est une chance de grandir dans un autre milieu culturel et de voyager. Mais il y a des jours ou je suis fatiguee et je suis contente de rester au calme en France…

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  • Globetrotteuse
    2 mai 2016 at 17 h 27 min

    Hello Stitch, comme je te comprends ! pour tout dire, j’ai orienté mes choix de vie afin d’avoir le budget nécessaire pour réaliser mes folles envies de voyages. Je rêve de faire un tour du monde dans un premier temps et mon rêve ultime c’est de quitter mon job actuel vers la quarantaine pour créer mon entreprise afin de pouvoir travailler à distance et par la même de continuer a voyager tout en travaillant sans contraintes… j’ai découvert une ouverture d’esprit en cotoyant d’autres personnes lors de nos voyages, des locaux, des touristes … et paradoxalement quand dans certains pays je vois des gens qui ne rêve pas de voyager mais qui savent profiter de leurs proches et leurs amis tous les jours, parfois je me dis que je ferais bien d’en faire autant. La vie est faites de choix, il faut juste ne rien regretter 🙂

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  • Sapparot
    3 mai 2016 at 4 h 09 min

    J’ai toujours envie les amis que je me faisais, plus jeune, qui avaient passe leur enfance a l’etranger. Pourtant, mes parents nous ont fait voyager pendant notre enfance. L’Asie, l’Afrique, l’Europe, les caraibes. Mais ca n’etait pas assez pour moi. A 23 ans, a la fin de mes etudes, j’ai decroche un VIE et 12 and plus tard, je ne suis toujours pas rentree. Ca n’a pas ete toujours facile mais au fond de moi, je sentais que la vie en France, d’une maniere permanente n’etais pas pour moi. L’annee derniere, j’ai passe 3 mois en France pour la naissance de mon 1er enfant. J’ai adore ces retrouvailles avec la france, mais j’ai pris ca comme des vacances prolongees. On remet ca cette annee pour le numero 2. Et d’ici le mois de juin 2017, le plan est de quitter le pays dans lequel nous sommes presentement et de bouger de nouveau. Mais on ne fera pas ca sans avoir un job qui nous attende dans le nouveau pays que nous sommes en train de selectionner. Les responsabilites financieres sont trop importantes. D’autant que vivre a l’etranger n’est pas incompatible avec un projet immobilier. J’ai achete une petite maison que je rembourse a mon rythme. Je ne me vois pas y vivre mais c’est un investissement pour l’avenir. A ceux et celles qui hesitent, j’ai envie de dire que tenter l’aventure c’est toujours mieux que de se dire « what if » a la fin de sa vie, mais mettez toutes les chances de votre cote. Avoir la securite d’un emploi qui vous attendent de l’autre cote vous aidera vraiment a faire de cette experience un succes. L’aventure, oui mais avec un garde fou.

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  • Anthony
    4 mars 2018 at 21 h 03 min

    Salut, j’ai 28 ans et j’ai aussi vécu en Guadeloupe de mes 5 ans à mes 10 ans. On s’est peut être déjà rencontré à cette époque…
    J’aimerais bien parler avec toi, sur les voyages, et avoir quelques conseils … En espérant avoir une réponse. Bonne soirée

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